Cela ne fait plus aucun doute pour la grande majorité des entreprises : les startups apportent une précieuse innovation sur le marché. Cependant, malgré le grand nombre de pilotes, incubateurs et concours d'innovation, le déploiement de solutions de startups au sein des grandes entreprises se solde souvent par un échec.
Quel rôle les équipes achats peuvent-elles jouer dans la relation startup-grand groupe ? Et quelles stratégies peuvent-elles adopter pour limiter les risques de ces collaborations ?
Selon une enquête menée par le Supplier-Enabled Innovation Center (SEIC), 85 % des responsables des achats identifient les capacités d’une startup comme étant « très importantes » ou « assez importantes » pour leur entreprise. Mais seuls 17 % d’entre eux considèrent leur département comme « très important » pour la collaboration avec les startups.
Les équipes des achats ont la lourde tâche de trouver un équilibre entre la recherche des meilleures solutions pour leur entreprise et leur devoir de limiter les risques, ce qui va à l'encontre de l’image des startups. En effet, une startup peut posséder le robot industriel le plus innovant au monde, mais si elle n'est pas en mesure de garantir une production à grande échelle et une stabilité financière à long terme, les inconnues peuvent être trop importantes pour qu'une entreprise se décide à sauter le pas.
Heureusement, il existe des moyens pour les équipes des achats de faire appel aux dernières technologies tout en réduisant les risques. En nous appuyant sur la méthodologie de ScaleX, nous présentons ci-dessous quelques critères et éléments clés à prendre en compte lors de l'évaluation d'un fournisseur potentiel issu de l’écosystème startup.
Avant qu'un responsable des achats ne commence à rechercher des fournisseurs innovants, il est évidemment essentiel de définir et de hiérarchiser les besoins stratégiques et technologiques de l'entreprise ainsi que le champ d'application. Mais il est tout aussi important de garder l'esprit ouvert quant à la forme que pourront prendre ces solutions, afin d'inclure les nouvelles technologies ou les nouveaux modèles.
De plus, les équipes des achats doivent définir ce qui fait qu’une collaboration avec une startup est réussie ou non aux yeux de leur entreprise. L'objectif est-il de trouver de nouveaux produits à utiliser en interne, d'acquérir un avantage concurrentiel, d’enrichir leur offre client ou de rendre leur marque plus innovante ? Une fois la liste des candidats potentiels établie, il est essentiel pour la réussite de la relation que les startups et l'entreprise comprennent parfaitement leurs objectifs et s'alignent dessus. Ensuite, l'entreprise et les startups sélectionnées doivent définir clairement des calendriers, des indicateurs de performance clés et des étapes de contrôle pour évaluer la pertinence de la relation. En évitant les malentendus et les retards, cela permettra ainsi de réduire les risques et d’augmenter les collaborations avec des startups.
Comme l'a déclaré Stefan Winners, membre du conseil d'administration de Hubert Burda Media, dans une étude du BCG : « Il est essentiel non seulement de créer une logique d'investissement tangible, mais aussi de communiquer clairement les objectifs et les résultats spécifiques d'une collaboration. Les deux parties devraient donc établir et signer une lettre d'intention concernant la collaboration afin de clarifier les attentes. »
Si vous êtes à la recherche d'une technologie de pointe et de solutions innovantes, il y a de fortes chances que les startups soient plus en avance que les autres fournisseurs traditionnels. Cela signifie également qu'elles disposeront de moins de données financières et d'études de cas de clients pour prouver leur légitimité. Les chiffres sont toujours utiles pour évaluer la capacité à livrer des produits et à générer des revenus, mais les équipes des achats doivent également examiner les aspects qualitatifs de la startup pour évaluer pleinement les risques.
L'équipe dirigeante de la startup, par exemple, donne une bonne indication du potentiel de croissance et de la stabilité de l'entreprise. Si les fondateurs maîtrisent les compétences techniques et commerciales pour diriger leur entreprise et ont engagé des cofondateurs ou des collaborateurs aux compétences complémentaires, c'est un signe positif de leur capacité à tenir leur promesse.
En effet, les données historiques de ScaleX sur plus de 2 000 startups notées et suivies montrent que l'expertise du marché et la complémentarité des équipes sont deux des critères les plus influents sur le taux de survie des startups. Ces données mettent également en évidence la forte corrélation entre le niveau de compétences commerciales des fondateurs et le potentiel de croissance de leur entreprise. En outre, même si les fondateurs n'en sont qu'au début de leur parcours, la vitesse à laquelle ils ont franchi les premières étapes techniques et commerciales est un facteur déterminant qui peut éclairer l'évaluation des risques. La complexité technique et les besoins de R&D qui en découlent, ainsi que la complexité juridique qui entoure le projet d'une jeune entreprise, doivent être pris en compte.
Un autre facteur de risque important est bien sûr le niveau de dépendance de la startup vis-à-vis des parties prenantes externes, qu'il s'agisse de fournisseurs, de partenaires ou de clients. Il peut être difficile d'évaluer et de comparer ces critères qualitatifs et quantitatifs dans le cadre du processus d'évaluation des risques. La méthodologie de score de ScaleX est un exemple de solution qui permet de pondérer ces facteurs et d'obtenir une image plus claire du potentiel et des risques d'une entreprise innovante.
Souvent, malgré une évaluation approfondie des risques et un pilote réussi, la collaboration entre une startup et une grande entreprise perd de son élan et meurt au stade du déploiement. Les raisons peuvent être multiples, bien sûr, et la responsabilité est souvent partagée entre le fournisseur innovant et son client de grande taille. Alors, que peut faire l'équipe des achats pour éviter un déploiement raté ?
Très souvent, les processus de contrôle des achats sont trop rigides et trop longs, ce qui les rend inadaptés aux jeunes entreprises innovantes. C'est pourquoi de nombreuses entreprises préféreront s'appuyer davantage sur leur service d'innovation ou sur des équipes métiers localisées que sur les achats pour introduire de nouvelles solutions par le biais de projets pilotes. Il en résulte généralement une mauvaise connaissance des POC d'innovation menés dans différents départements, y compris celui des achats. Nous observons que de nombreux grands groupes ont désormais chargé leurs équipes des achats de collecter et de centraliser les informations sur les collaborations et les POC lancés avec des startups.
Par conséquent, l'amélioration des relations entre les achats et les startups nécessite des approches plus agiles des appels d'offres et de la diligence raisonnable, ainsi qu'une communication accrue entre les départements. Cela permet d’améliorer la sensibilisation de tous les collaborateurs et de favoriser leur appétence pour les fournisseurs innovants. La publication régulière de bulletins d'information internes tout au long de la phase pilote, puis de la phase de déploiement, est un moyen facile de sensibiliser les collaborateurs.
Certains clients de ScaleX ont également amélioré l'adhésion interne en mettant en place une plateforme de gestion des relations avec les startups, où n’importe quel employé peut en apprendre davantage sur les startups fournissant des services. En outre, il faut s'assurer de définir clairement la source du budget et son affectation à l'utilisation de solutions de startups dès le départ, car cela peut faire une grande différence dans l'adoption interne.
D'autre part, les difficultés de déploiement peuvent s’expliquer par la complexité de l'intégration des nouvelles technologies dans les infrastructures existantes. Par exemple, les solutions d'IA peuvent ne pas fonctionner si l'infrastructure de données de l'entreprise est cloisonnée et non standardisée. L'équipe de la startup doit avoir un contact direct avec les équipes techniques et juridiques de l'entreprise afin de garantir une intégration sans encombre et d’anticiper les complications potentielles dès le départ. De plus, il ne suffit pas que la startup crée une API et un manuel écrit, elle doit être prête à faire quelques ajustements et accepter qu’il soit difficile de modifier les rouages d’une grande entreprise. Par conséquent, la startup et l'équipe des achats doivent travailler ensemble pour préparer le terrain et soutenir la mise en œuvre de nouvelles solutions.
Enfin, il est juste de dire que la collaboration avec un jeune fournisseur innovant ne peut jamais être totalement sans risque. Toutefois, les grandes entreprises ne doivent pas se laisser décourager par les risques car elles passeraient à côté de solutions révolutionnaires. S'assurer que la startup est en phase avec les besoins et les objectifs de l'entreprise, qu'elle obtient de bons résultats en termes d'indicateurs financiers et qualitatifs, et que la feuille de route de déploiement est planifiée de concert avec les équipes métiers et les parties prenantes internes concernées peut contribuer à minimiser les risques et à optimiser les chances de réussite.
Traduit de l’anglais par Margaux Cervatius